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Bergie, le héros de Québec

Peter Stastny, Joe Sakic, Michel Goulet, Dale Hunter, ont particulièrement marqué l'histoire des Nordiques de Québec. Ce que les trois premiers ont accompli, dans l'uniforme bleu, leur a ouvert la porte du Temple de la Renommée. Joe Sakic, pour toute sa carrière, à Québec et au Colorado, ne tardera pas à aller rejoindre ses deux ex-coéquipiers Stastny et Goulet dans ce sanctuaire à Toronto. Un autre membre de cette équipe et de cette époque mémorable est resté adulé tout autant qu'eux: Michel Bergeron.
Bergy, comme l'appelle ses intimes, a pris et conserve une place unique dans le c?ur des supporteurs des Nordiques. Derrière le banc de cette équipe, il a accompli ce qu'aucun autre n'est parvenu à approcher un tant soit peu. Maurice Fillion était allé le chercher à Trois-Rivières, où il était le héros de cette ville, alors qu'il dirigeait les Draveurs de la Ligue Junior. Fillion avait causé une véritable surprise en choisissant le «petit Tigre» pour devenir son entraineur-adjoint.
Maurice Fillion a poussé l'audace plus loin encore, puisque quelques semaines plus tard il lui cédait sa place d'entraineur chef. «Maurice m'avait appelé et il est venu me rencontrer. Nous avons discuté plusieurs heures. Il me demandait si j'étais intéressé à me joindre aux Nordiques, sans jamais me dire dans quel rôle», raconte Michel.
«Puis vers la fin, il m'a finalement invité à devenir son adjoint derrière le banc. J'ai hésité parce que j'étais royalement traité à Trois Rivières. La saison venait de prendre fin pour les Draveurs. J'ai rencontré mes patrons et je les ai mis au fait de la situation. Finalement je me suis dit l'occasion de graduer dans la Ligue Nationale m'est offerte, je ne peux refuser.»
Après seulement six matchs de la saison régulière, Maurice Fillion décidait d'occuper seulement le poste de directeur gérant des Nordiques et laissait les rennes à Michel. «Je dirais que ça été le plus beau moment de ma carrière» raconte-t-il.


LE GRAND BONHEUR


Michel Bergeron a vécu les moments les plus mémorables et palpitants de sa vie derrière le banc des Nordiques de Québec. Son amour du hockey, son attachement à ses joueurs, son affection pour le public et surtout sa soif insatiable de victoires en ont fait l'un des enfants chéris de la ville toute entière. Michel ne vivait que pour son sport, au point d'oublier parfois sa famille. Pour l'avoir côtoyé durant toutes ses années, il est facile de dire combien il était un homme attachant et entier.
J'ai eu le plaisir de l'accompagner des soirées durant, à boire du café et à fermer les cafétérias des hôtels tard durant la nuit, où logeaient les Nordiques. «Je serai un Nordiques toute ma vie. Aujourd'hui les gens me pointent du doigt parce que je suis analyste et critique dans le giron des Canadiens ». «Mon c?ur est Nordique, mais là je suis au travail dans mes fonctions. C'est différent. À ne pas confondre», tient-il à préciser.
Et il ajoute, «Je dirais que les deux victoires en séries éliminatoires sur le Canadien ont été les plus grands moments que j'ai vécu derrière le banc des Nordiques. Ce que j'ai ressenti est inexplicable. Je me souviendrai pour toujours le but de Dale Hunter au Forum dans le cinquième match qui éliminait le Canadien et celui de Peter, dans le septième match au Forum une autre fois, qui nous faisait triompher. Je ne pourrai jamais décrire l'émotion que j'ai vécu.»
Michel n'a jamais accepté les deux éliminations des Nordiques contre le Tricolore. Le soir de ce fameux Vendredi Saint, où l'arbitre Bruce Hood a laissé des joueurs revenir sur la patinoire, Mario Tremblay et Richard Sévigny, qui avaient pourtant été chassés du match après la fameuse bagarre.
Ces deux joueurs s'en sont pris à Peter Stasny et Dale Hunter que Hood a également chassé. Les Nordiques se sont retrouvés avec deux joueurs de centre seulement, André Savard et Jean François Sauvé ont perdu une avance de deux buts pour s'incliner. Bruce n'a plus jamais arbitré par la suite. Et inutile de rappeler le but d'Alain Côté. Michel Bergeron en parlera pour le restant de ses jours.


AUTRE VIE


Après avoir dirigé les Rangers de New York, le petit Tigre a été rapatrié par les Nordiques. «J'ai signé un contrat de dix ans. Pierre Lacroix, président de l'Avalanche du Colorado aujourd'hui, était à ce moment mon agent. Les choses ont mal tourné. J'ai donc quitté sans compensation moins de deux ans après. Je n'ai rien demandé comme compensation. Si c'était à recommencer j'agirais sûrement autrement» jure-t-il.
Michel Bergeron ne s'est pas retrouvé au chômage. Ho que non ! Les stations de radio et de télévision se l'arrachaient. Il était un communicateur-né. «Disons que j'avais fait mes classe avec vous les journalistes». Il a toujours été verbomoteur. Comme rien ne lui échappait il pouvait discourir des heures. Il était captivant pour la presse.
«Je n'ai rien perdu au change vraiment. Pierre a négocié mes premiers contrats avec CKAC et TVA où je me suis retrouvé analyste. Puis j'ai fait toutes les stations de télé et j'ai eu le bonheur de travailler avec des professionnels comme André Côté, Jean Pagé, Claude Quenneville et Richard Garneau. J'ai appris. Mais à un certain moment je ne voulais plus voyager. J'ai donc choisi de commenter le hockey sur d'autres émissions que la soirée du hockey».
Il y a huit ans, Michel a fait un ACV. Il a failli y laisser sa peau. «Cela a changé ma vie. J'ai cessé de fumer et puis j'ai oublié cette passion de vouloir diriger une équipe. Je pense que cette fonction doit être remplie par des plus jeunes maintenant. Des jeunes qui ont une nouvelle philosophie sur la façon de mener une équipe. On voit ce que Guy Boucher fait comme boulot à Tampa. Les méthodes ont changé» soutient Michel.
«Regarde Jacques Martin à Montréal. Ce n'est pas facile». Michel ne le dit pas, mais on sent qu'il estime que les entraineurs de la vieille école n'ont plus le même succès.
Et parlant du Canadien qui en arrache de plus en plus, il ne met pas de gants blancs. «Il est évident qu'il n'y a aucun leader dans cette équipe. Quand le Canadien gagne tout va bien, mais lorsqu'ils perdent c'est le bordel et il n'y a personne qui peut redresser la situation. C'est clair qu'il se passe quelque chose de malsain dans cette chambre et que tous les joueurs ne veulent plus souffrir pour Jacques».
Sans la moindre pose il continue, «Lorsque j'ai commencé avec les Nordiques, il y avait plein de francophones qui ne m'ont pas accepté. Je m'en foutais parce que je suis arrivé en même tant que Peter et Anton, Dale et Michel Goulet. Peter et Dale étaient de vrais leaders. Nous avons participé aux séries les huit premières années que j'ai dirigé les Nordiques. Tout le monde devait suivre parce que nos leaders donnaient l'exemple sur la glace. Peter et Dale venaient jouer tous les soirs. Ce n'est pas ce que l'on voit à Montréal présentement», conclut l'une des idoles de cette magnifique époque des Nordiques de Québec.
Et dans sa deuxième carrière Michel Bergeron est devenu encore plus populaire que jamais. Parce que dans le temps, tous les supporteurs du Canadien, tous les joueurs de la Ste-Flanelle, particulièrement Mario Tremblay et Guy Carbonneau, étaient ses ennemis jurés. Aujourd'hui ils jouent au golf ensemble et sont comme larrons en foire. Et oui, dans sa deuxième carrière, Michel Bergeron, est continuellement en demande et pas à n'importe lequel prix. Il sera là tant qu'il le voudra. Au fond, il a choisi ce qui lui convenait le mieux : La communication. Croyez-moi ceux qui le connaissent intimement le trouve loyal et combien attachant.
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