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L'accaparement des terres agricoles, un phénomène inquiétant

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Michel Chassé - L'Oie Blanche

Même si l?accaparement des terres agricoles n?a pas encore touché la Côte-du-Sud, M. Hervé Dancause s?inquiète du phénomène parce qu?il marque la fin du concept de propriétaire exploitant, l?une des composantes les plus fondamentales du modèle agricole québécois.

«Le meilleur système, c?est quand l?agriculteur possède sa terre et veille à son exploitation» nous a-t-il confié quand nous l?avons rencontré vendredi dernier au siège social de l?UPA de la Côte-du-Sud à La Pocatière. M. Dancause s?interroge sur les intérêts des acheteurs, comme la Banque nationale qui vient d?acheter 5 000 hectares de terres agricoles au Lac-Saint-Jean ou le géant Hyundai qui a acquis de nombreuses terres dans le monde entier: «Quel est leur intérêt? Cultiver ou spéculer! Ça m?inquiète énormément et il faut que ça cesse».

IREC

L?UPA provinciale a d?ailleurs demandé à l?Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC) d?effectuer une étude sur le sujet. Intitulé «L?accaparement des terres et les dispositifs d?intervention sur le foncier agricole», le rapport identifie entre autres les pratiques spéculatives de plusieurs acteurs financiers comme l?un des facteurs pouvant expliquer cette explosion de transactions foncières. Au dire de M. Robert Laplante, directeur général de l?IRÉC, «La crise financière de 2008 a généré les conditions pour une véritable ??ruée?? vers les terres, considérées comme une valeur refuge par les gestionnaires de fonds en temps de crise». Selon l?IREC, les causes profondes du phénomène s?expliquent assez facilement: l?augmentation de la demande de produits de base, en particulier la nourriture et les biocarburants, ainsi que la financiarisation du secteur agricole ont transformé les terres en actifs sûrs et rentables pour le portefeuille des investisseurs: «Là se situe, selon nous, l?origine véritable du phénomène et c?est de cette façon que le Québec sera éventuellement entraîné dans la tourmente si rien n?est fait» explique M. François L?Italien, l?auteur du rapport. D?après l?étude, le Québec dispose actuellement de très peu de moyens pour mesurer l?accaparement des terres sur son territoire: «D?où la nécessité d?établir à très brève échéance un mécanisme de surveillance des transactions foncières agricoles» de dire M. Marcel Groleau, président de l?UPA provinciale.

Si la mise en place d?un Bureau d?enregistrement et de surveillance visant à répertorier et autoriser toute transaction foncière se présente comme une avenue prometteuse, comme cela se fait en France, il reste que le meilleur rempart contre l?accaparement demeure une politique agricole efficace et dynamisante: «Plus le secteur agricole québécois sera ro-buste et prospère, moins l?échappatoire que représentent ces nouveaux acheteurs sera séduisante» de conclure l?IREC.

Étude

M. Pierre Corbeil, ministre de l?agriculture, a senti l?inquiétude de l?UPA puisqu?il a commandé une étude visant à documenter l?acquisition des terres agricoles au Québec.

André Simard

M. André Simard dénonce l?achat par la Banque nationale de 5 000 hectares de terres agricoles au Lac-Saint-Jean, allant même jusqu?à dire que l?institution financière pouvait bénéficier des différents programmes gouvernementaux destinés aux agriculteurs en difficulté: «L?agriculture, c?est le garde-manger des Québécois. C?est stratégique pour notre nation. Pendant que des agriculteurs sont obligés de mettre la clé dans la porte de leur ferme, une banque qui fait des profits annuels supérieurs à un milliard de dollars achète des terres agricoles et pourrait bénéficier de programmes d?aide financière aux agriculteurs. Ça n?a aucun sens! J?en suis complètement abasourdi» lance-t-il. Selon le député de Kamouraska-Témiscouata, le ministre Corbeil doit rapidement remédier à cette situation et s?assurer que les Québécois, et non des fonds d?investissement, demeurent maîtres de leurs productions agricoles.

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