Michel Chassé-L'Oie blanche
À l'automne 2011, la fabrique Notre-Dame-de-Bonsecours effectuait un grand ménage dans le vieux cimetière de L'Islet-sur-Mer, une initiative qui avait soulevé l'indignation chez d'aucuns. Or, cet événement allait devenir l'élément déclencheur du colloque «L'avenir des cimetières du Québec» qui a eu lieu les jeudi 31 octobre et vendredi 1er novembre à l'Université Laval sous la férule de l'Écomusée de l'Au-delà et de la Société québécoise d'ethnologie.
M. Jean Simard, résidant de Saint-Roch-des-Aulnaies et ethnologue réputé, présidait ce colloque. Il s'agit du même Jean Simard qui nous avait accordé une entrevue à l'automne 2011, après le ménage à L'Islet-sur-Mer, pour nous rappeler qu'il préconisait depuis longtemps la municipalisation des cimetières.
Selon les organisateurs du colloque, la grande majorité des quelque 2 500 cimetières du Québec se trouve menacée de déshérence parce que les fabriques ne possèdent plus les fonds suffisants à leur entretien: «Il faut trouver des solutions alternatives pour assurer la pérennité de ces lieux historiques, ultimes marqueurs de notre mémoire» de lancer les organisateurs du colloque, lequel visait justement à réunir des intervenants intéressés à trouver des pistes concrètes pour garantir le devenir des cimetières québécois.
Pourquoi les protéger? Parce qu'ils sont des lieux d'archives et de mémoire de la population et, qu'à ce titre, ils font partie du patrimoine commun de tous les Québécois.
Comment les protéger? Les participants au colloque ont accouché d'un document intitulé «Déclaration finale en faveur d'une loi-cadre et d'une fiducie» qu'ils présenteront le 15 novembre au Conseil du patrimoine religieux du Québec.
Cette déclaration s'inspire des constats suivants: lieux d'archives et de mémoire, les cimetières se trouvent menacés de déshérence et de dégradation: leurs gardiens traditionnels, souvent des fabriques, ne disposent plus des ressources pour en assurer la conservation et la bonne marche: les cimetières deviennent de plus en plus des lieux d'intérêt public pour leurs qualités paysagères, muséales et architecturales: la Loi sur le patrimoine culturel du Québec reconnaît aux municipalités le pouvoir d'intervention en matière de préservation et protection de ces lieux.
À partir de ces constats, les participants estiment que l'avenir des cimetières passe par un encadrement législatif qui permettrait d'encadrer la disposition des restes humains (incluant les cendres cinéraires), placer les cimetières en difficulté sous la responsabilité des municipalités (en collaboration avec les propriétaires ou gestionnaires), garantir les rituels propres à chaque tradition religieuse et créer un fonds d'entretien placé en fiducie.
Même s'il aurait préféré un texte plus rigide, M. Simard endosse cette déclaration finale qui s'inspire de la loi ontarienne adoptée en 2012, après dix ans de discussion. Montrant plus de souplesse qu'une municipalisation pure et dure, cette loi vise quand même à protéger les lieux d'archives que constituent les cimetières et à conserver des traces des cendres cinéraires: «Au Québec, aucune loi ne régit la manière de disposer des cendres, de sorte que nous pouvons perdre la trace d'une personne» de déplorer M. Simard.
L'Église? Au dire de M. Simard, Elle est prête à se départir de ses églises, mais pas de ses cimetières: «Elle tient plus aux morts qu'aux vivants» de lancer le principal intéressé avec un soutire en coin.
Une attitude qui ne réglera pas le problème: «Avant, il y avait autant de paroissiens que de citoyens dans nos villages. Aujourd'hui, on y trouve toujours des citoyens, mais de moins en moins de paroissiens pour payer la facture. Il va falloir trouver une solution et nous en proposons une» de conclure M. Simard.