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Les rentes seigneuriales ont perduré jusqu'en 1970 au Québec

Le régime seigneurial, la plus ancienne institution de l'histoire du Québec, avait la vie dure. Aboli en 1854, il survivra à sa propre mort et persistera jusqu'en... 1970.

Quelque 30 personnes ont assisté, dimanche dernier au Musée de la mémoire vivante de Saint-Jean-Port-Joli, à la conférence «Les persistances du monde seigneurial après l'abolition: sur la piste de la mémoire seigneuriale» donnée par MM. Benoît Grenier, professeur et historien de l'Université de Sherbrooke, et Michel Morissette, étudiant au doctorat.

Faut dire que les deux conférenciers, qui pilotent un projet de recherche intitulé «Les persistances du monde seigneurial après 1854: culture, économie, société», cherchent des témoignages d'anciens censitaires ou témoins des dernières décennies de la persistance du régime seigneurial et du paiement des rentes afin d'immortaliser cette mémoire vivante. Ce n'est donc pas un hasard si la conférence se déroulait au Musée de la mémoire vivante, car les documents audiovisuels (témoignages des gens) produits par les chercheurs y seront consignés et conservés.

Dimanche dernier, les chercheurs ont réussi un doublé puisque deux personnes dans la salle avaient des réminiscences du paiement des rentes seigneuriales.

M. Serge St-Pierre a parlé pour son père, M. Raynald St-Pierre, qui se rappelle que le seigneur Ernest Fortin venait lui-même à la maison familiale pour percevoir ses rentes. On se trouvait alors dans les années 1930.

De son côté, M. Jean-Marie Fortin se souvient que son père, M. Simon Fortin, se rendait chez M. Ernest Fortin pour lui payer une rente.

En 1871, Philippe-Aubert de Gaspé a vendu les rentes seigneuriales de Saint-Jean-Port-Joli et du Fief Rhéaume (ou L'Islet-à-la-Peau) à Narcisse Duval. À la mort de ce dernier en 1902, son neveu Ernest Fortin prend possession des rentes jusqu'en 1940.

Cette année-là, pour rompre définitivement le lien seigneur/censitaire, le gouvernement a indemnisé les quelque 550 propriétaires de seigneuries au Québec. Une indemnisation de 3,2 millions$ (environ 40 millions$ aujourd'hui). Pour sa part, M. Ernest Fortin a reçu 7 197,68$.

Mais cette indemnité de 3,2 millions$, fallait que quelqu'un la rembourse, entre autres les anciens censitaires. À partir de 1940, après avoir établi ce que chacun devait payer, on pouvait désormais rembourser son dû par le biais du compte de taxe. Selon les estimations de l'époque, il faudrait 41 années pour remettre le tout, soit de 1940 à 1981. Mais le dernier paiement d'une rente seigneuriale au Québec s'est effectué le 11 novembre 1970!

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