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Lettre ouverte concernant la fin des services ambulanciers de nuit à Saint-Fabien-de-Panet

Aujourd'hui, j'ai mal, je suis dévastée, je suis dans l'incompréhension, je suis frustrée. Sans vous mentir, je ne sais pas trop quoi dire ni comment le dire et, pourtant, je suis en train d'écrire cette lettre, non pas parce que quelqu'un me l'oblige, mais plutôt parce que mes valeurs me le dictent et parce que, pour moi, ça ne fait pas de sens de ne pas réagir.

Depuis vendredi soir, je m'efforce à comprendre la décision de la part du CISSS et du ministère de la Santé de nous enlever nos ambulances pour le quart de nuit.

Certains me diront que c'est une décision en raison de la pénurie de main-d'œuvre et à ça je répondrai que nous avons les effectifs à Saint-Fabien-de-Panet, comme l'a si bien dit Mario Robitaille lors d'une entrevue à TVA nouvelles.

Alors pourquoi ? Peu importe les arguments qu'on m'apportera, je pourrai toujours rétorquer avec un pourquoi ?

Et je pourrai sûrement répondre aussi avec des solutions aux problèmes, parce qu'en cas de manque de main-d'œuvre, pourquoi ne pas renforcer nos services, pourquoi ne pas donner plus d'argent en santé pour permettre des salaires décents, pour permettre des conditions de travail qui ont du sens aux travailleurs de la santé, plutôt que de couper des services aux contribuables ?

La décision de couper le service des ambulances de Saint-Fabien-de-Panet pour le quart de travail de nuit touche plus de 7 municipalités, on parle d'environ un peu plus de 4000 habitants. 4000 contribuables auxquels on dit : efforcez-vous de ne pas faire de crise cardiaque après 18h. Décision que même les paramédics ne comprennent pas et s'efforcent heureusement à faire renverser.

J'aimerais qu'on prenne un instant pour se souvenir des quatre personnes qui ont mis sur pied ce service qui, rappelons-le, était nécessaire pour nos petites localités.

Les ambulances à Saint-Fabien-de-Panet ont été rendues accessibles par des citoyens pour répondre à un besoin, puisque le temps d'attente avant de recevoir des services de soins de santé d'urgence était trop long sans service d'ambulances à proximité.

Besoin que nous avons toujours en date d'aujourd'hui, même si les ambulances de la zone A-22 inc. ont été rachetées par la compagnie des Ambulances L'Islet-Sud depuis plus d'une quinzaine d'années.

J'aimerais qu'on pense à toutes ces heures que nos paramédics passent à nous donner un énorme coup de main.

Pensons à nos paramédics qui justement, par manque de couverture ambulancière à l'extérieur, viennent parfois, même souvent, en aide aux autres territoires. On me dit « ne vous inquiétez pas, les ambulances des autres villes viendront vous aider ». Encore est-il que pour quelqu'un qui est entre la vie et la mort, 45 minutes d'attente, ça coûte parfois une vie.

45 minutes, c'est le temps que ça prend pour se rendre à l'hôpital le plus proche pour la plupart d'entre nous. Vous me direz : « vous avez un CLSC. » CLSC, qui doit déjà desservir plusieurs de ces municipalités parce que nous n'en avons pas d'autres. Encore est-il qu'un CLSC, c'est un CLSC : c'est justement fait pour traiter les cas les moins urgents.

Jambes cassées, conjonctives, nommons-les… bien sûr, on a un CLSC. Il est ouvert 24h/24, et on est chanceux. Un CLSC c'est un service supplémentaire : il y a des situations qui nécessitent des soins de santé d'urgence, là. Maintenant.

On me dira probablement : « ce n'est pas grave, quand vous appelez le 911, vous êtes accompagnés de professionnels qui vous disent quoi faire. » Oui. Mais que ferons-nous des gens qui font des accidents, qui sont seuls dans leur voiture, et qui n'ont qu'assez de force pour contacter le 911 ? Pensons également à ces personnes-là, parce que même si on peut se dire que ça n'arrive que quelques fois, ça arrive quelques fois de trop.

Cette décision de couper les services de nuit des ambulances de Saint-Fabien-de-Panet m'apparaît comme étant irresponsable.

Un jeune au Bas-Saint-Laurent est mort à cause d'une situation d'urgence, attendant plus de 40 minutes avant l'arrivée des services d'urgence.

Attendrons-nous qui soit trop tard, qu'une situation ou des situations du genre arrivent, pour apprendre que ce n'est pas la solution ?

Un tiers des appels surviennent de nuit, ce sont souvent les plus urgents, comme l'a mentionné Mario Robitaille. Couper les services ambulanciers de nuit, c'est mettre en danger des personnes qui ont besoin de soin dans l'immédiat.

J'aimerais qu'on m'explique quels sont les réels motifs derrière cette décision. Parce que d'enlever des services aux contribuables, je crois que c'est rarement — si ce n'est pas jamais — la solution. Tous ces gens méritent les services de santé qui sont en place.

Pensons aux petites familles, aux municipalités et aux MRC qui se sont efforcées à ce que nos petites municipalités soient de plus en plus attrayantes.

Prenons deux minutes pour penser à toutes ces heures de travail, tous ces efforts et surtout tous ces milliards de dollars qui ont été mis dans des projets qui avaient pour but de rendre nos villages vivants. On veut des services et une économie florissante.

Ce à quoi le ministère de la Santé nous répond : nous allons vous couper une partie de vos services essentiels.

Avez-vous pensé aux répercussions sur la santé de nos contribuables ? Avez-vous pensé également aux effets que ça aura sur la population ?

Les gens partent de plus en plus vers la ville. Nous nous efforçons pour rendre nos villages plus attrayants. Comment voulez-vous que nos populations soient grandissantes, soient intéressantes pour les familles, pour les futurs arrivants si on leur dit : « ah oui, en passant, arrangez-vous pour vivre vos urgences entre 6h et 18h, sinon, le temps d'attente peut être vraiment long ! » Pouvons-nous être cohérents et mettre nos efforts en commun, pour le bien commun ?

J'aimerais préciser que je ne tape sur les doigts des paramédics qui font déjà un travail extraordinaire et qui fournissent des efforts plus que surhumains pour être des plus disponibles. Ce n'est pas de leur faute si notre système de santé est déjà malade, et ce, depuis longtemps.

En prenant des décisions de la sorte, je me demande qui on aide vraiment. Les poches du gouvernement ? Pourtant, j'aimerais vous le rappeler, on paie pour des services de santé. Ce n'est pas parce qu'on est dans de petites municipalités éloignées qu'on ne devrait pas avoir accès à nos services, au contraire, je crois qu'on en a gravement besoin.

Aujourd'hui, j'ai mal, j'ai peur, je suis dévastée pour ma petite municipalité et pour toutes ces autres qui devront écoper d'une décision comme celle-ci. On a besoin de nos services ambulanciers de nuit et, en date d'aujourd'hui, le temps d'attente et le manque de couverture ambulancière ont malheureusement déjà frappé le Québec, malgré les efforts considérables des paramédics.

Alors qu'allons-nous faire ? Allons-nous attendre une catastrophe pour nous rendre compte que ces services sont essentiels ? Je demande au CISSS de Chaudière-Appalaches et au ministère de la Santé et des Services sociaux de ne pas mettre la vie des contribuables en danger pour une question de quelques milliers de dollars.

Je demande aux députés locaux de prendre la parole. La population est apeurée et en questionnements. Aurons-nous votre appui ?

 

Myriam Bélanger
Bachelière en communication appliquée, Université de Sherbrooke

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