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Débat sur la Charte «On a l'impression de perdre de quoi» -l'abbé Justin Picard

De gauche à droite, l'abbé Justin Picard, curé des quatre paroisses du centre de la MRC de Montmagny, sœur Rollande Raby, agente de pastorale et Paul-Aimé Laferrière, diacre permanent.

Diane Gendron-L'Oie blanche

«On ne gagne rien dans la Charte des valeurs proposée par le gouvernement québécois. On a plutôt l'impression de perdre notre histoire religieuse chrétienne, notre histoire à nous, et c'est ce qui fait le plus mal». S'exprimant en ces termes, l'abbé Justin Picard, curé de quatre paroisses de Montmagny-centre, résumait ainsi l'opinion du groupe «Prenons la parole», qui a réfléchi et pris position dans ce débat.

Le jour où s'ouvrait à Québec la Commission parlementaire sur la Charte des valeurs québécoises, le 14 janvier, le journal l'Oie blanche a rencontré trois porte-paroles de ce groupe de réflexion formé de 34 citoyens des paroisses de Saint-Paul-de-Montminy, Sainte-Apolline-de-Patton, Sainte-Euphémie-sur-rivière-du-Sud et Notre-Dame-du-Rosaire.

Fait à noter, «Prenons la parole» est le seul groupe du diocèse de Sainte-Anne-de-la-Pocatière à avoir déposé un mémoire à la Commission parlementaire.

S'inscrivant dans le sillage de l'année de la Foi (en 2013), cette réflexion fait suite à la volonté du conseil de pastorale du secteur d'initier la réflexion sur des grandes questions. De ces rencontres sont ressorties d'abord des sentiments d'incompréhension et de crainte face à ce projet de charte ambigu, niant l'expérience religieuse chrétienne, affirme l'abbé Picard.

«Est-ce que ça veut dire qu'on laisse la place à la minorité ?», lance Paul-Aimé Laferrière, diacre permanent. «Pire, certaines personnes vont jusqu'à se demander si les prochaines générations ne seront pas obligées de se cacher pour pratiquer leur religion», enchaîne Sœur Rollande Raby, agente de pastorale.

Nos échanges nous ont permis de discerner que nos résistances venaient du cœur et que le projet de loi avait une froideur rationnelle, mentionne l'abbé Picard.

Le non-dit

Le groupe d'ici questionne le non-dit dans ce projet de charte. «C'est clair que l'objectif derrière tout cela est d'évacuer le religieux du décor politique», insiste Justin Picard. «Avec la laïcité, on a fait le partage du religieux et de la politique. Aujourd'hui, c'est la politique qui se mêle de la religion. Bref, au lieu d'unir, le débat divise la société québécoise», intervient M. Laferrière.

En revanche, le groupe est d'avis que la charte doit tenir compte de l'égalité homme-femme, «sinon c'est un retour en arrière», tout comme on ne peut accepter des visages cachés, mentionne l'abbé Picard. Celui-ci demeure persuadé que l'Islam est l'élément déclencheur du débat, mais que derrière se profile la visée politique de mettre de côté le religieux, de conclure le prêtre.

Tout le monde ne partage pas le même avis. Ainsi, nos interlocuteurs reconnaissent que des gens se disent en faveur de la charte. Quant à la possibilité que le débat puisse changer les choses, les porte-parole du groupe ne se font pas d'illusion. Par contre, il restera toujours la prise de conscience générée par cet exercice dans le milieu. Et, il y en aura d'autres puisque la prochaine rencontre portera sur un autre sujet sensible: le «Mourir dans la dignité».

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