Les présidents des commissions scolaires de la région 03-12 ont fait parvenir une lettre ouverte au premier ministre concernant les enjeux de la démocratie scolaire. Voici l'intégrale de la publication de cette lettre.
Les enjeux de la démocratie scolaire
Monsieur le Premier ministre,
Votre gouvernement a signifié son intention d'éliminer les élections scolaires au suffrage universel. Rappelons que partout au Canada, il existe également un type de démocratie semblable au nôtre. Avant que vous ne preniez trop précipitamment une décision, nous désirons mettre un peu de lumière autour de la démocratie et la place des parents dans le système d'éducation actuel. Cet éclairage appuie notre demande de cesser de jouer dans les structures actuelles du système public d'éducation et de travailler avec nous pour l'ultime raison qui nous préoccupe tous : la réussite des élèves.
La spécificité de l'élu scolaire :
Les élus scolaires peuvent s'impliquer en éducation parce que la population les choisit tous les quatre ans. C'est démocratique.
Les élus scolaires disposent d'une indépendance et d'une autonomie politique qui leur confèrent la possibilité de faire des choix locaux, cohérents avec la réalité de leur commission scolaire, en s'appuyant sur les valeurs et les idées qu'ils ont défendues en campagne électorale et qui les ont fait élire. Ils font des choix indépendamment des réseaux d'influence et des partis politiques.
Les élus scolaires sont porteurs d'un message politique qu'ils défendent bec et ongles. Ainsi, ils revendiquent haut et fort que l'éducation doit être la priorité numéro un au Québec, qu'elle appartient à la population et que chaque citoyen doit se sentir interpellé par la question scolaire. Le maintien de l'élu scolaire représente un message de mobilisation citoyenne autour de leur système public d'éducation dont dépend l'essor du Québec. Nos écoles font la promotion de la démocratie par le biais des Parlements étudiants. Quel message enverrez-vous à notre jeunesse en éliminant un palier démocratique si ce n'est celui du désengagement social?
Le pouvoir actuel des parents :
Un des buts souvent avancés du prochain projet de loi est d'accentuer le pouvoir aux parents dans le système scolaire. Mais quelle place occupent déjà les parents? À l'intérieur du conseil d'établissement, les parents procèdent à l'adoption du projet éducatif, à l'adoption du budget de l'école, à l'approbation du plan de réussite, de la convention de gestion et de réussite éducative, du plan de lutte contre l'intimidation et la violence, des règles de conduite et des mesures de sécurité, du temps alloué à chaque matière obligatoire, etc. L'organisme de participation des parents (OPP) mobilise les parents à la réalisation et à l'évaluation périodique du projet éducatif de l'école. Le comité de parents de la commission scolaire doit être consulté entre autres sur le plan stratégique, la politique relative au maintien ou à la fermeture d'école et la répartition des services éducatifs entre les écoles.
L'assemblée générale des parents, qui a lieu en septembre, constitue la porte d'entrée pour les parents qui désirent s'engager dans le milieu scolaire. Que ce soit au sein de l'organisme de participation des parents, au conseil d'établissement de leur école, au comité de parents de leur commission scolaire, au comité consultatif des élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, à la Fédération des comités de parents du Québec ou encore au conseil des commissaires, un parent volontaire dispose d'un vaste éventail de possibilités d'implication.
Pour accroitre l'influence des parents, nous sommes en faveur du droit de vote des parents qui siègent au conseil des commissaires et d'élargir leur participation à l'ensemble des comités du conseil des commissaires prévus par la loi, si tel est leur désir.
Les coûts de l'élection scolaire :
Le budget prévu pour les élections scolaires en 2014 s'élevait à 20 millions de dollars. Le coût réel fut d'environ 12 millions de dollars ou 3 millions par année pour un mandat de 4 ans. La démocratie scolaire a coûté environ 50 sous par contribuable par année. Est-ce un coût si inacceptable pour une société qui prétend placer l'éducation au sommet de ses priorités et privilégier la démocratie comme assise sociale?
La participation aux élections scolaires :
Récemment, monsieur Paul Gérin-Lajoie, premier titulaire du ministère de l'Éducation du Québec, n'a pas hésité à dire, en votre présence, Monsieur le Premier ministre, que le faible taux de participation aux élections scolaires était peut-être la preuve que les citoyens étaient satisfaits des commissaires et que le suffrage universel demeure la seule façon d'assurer que la gouvernance de nos écoles soit assumée par les bonnes personnes, pour les bonnes raisons. Pour nous, le faible taux de participation ne devrait pas servir de prétexte pour éliminer un pan de notre démocratie, mais devrait représenter un défi d'en faire la promotion et de mobiliser les citoyens autour de la question scolaire. La simultanéité des élections scolaires et municipales, telle que mise en place dans les autres provinces canadiennes, assurerait de véritables conditions gagnantes pour la démocratie scolaire. La solution est connue de tous et a fait ses preuves partout.
Une demande simple et mobilisatrice :
Nous vous demandons, Monsieur le Premier ministre, de maintenir l'élection du président et des commissaires scolaires par suffrage universel tout en cherchant à augmenter la place influente des parents au sein de leur commission scolaire.
Nous vous prions, Monsieur le Premier ministre, d'agréer nos sentiments les meilleurs.