Michel Chassé-L'Oie blanche
La nouvelle de la vente des hebdos de Québécor à TC Média venait à peine de faire la manchette qu'Hebdos Québec manifestait son contentement face à cette situation de quasi monopole.
Dans un communiqué émis sans consultation préalable auprès de leurs membres, MM. Paul Brisson et Gilber Paquette, respectivement président et directeur général de l'association des hebdos indépendants, exprimaient clairement leur satisfaction: «Nous sommes persuadés que tous les joueurs de l'industrie pourront maintenant renouer avec la rentabilité, durement affectée par une féroce guerre de prix» écrivait M. Brisson.
Au dire de M. Paquette, la bulle créée en 2010 par l'apparition de 23 nouveaux hebdos a déséquilibré le marché: «Au cours des trois dernières années, près de deux millions d'exemplaires se sont ajoutés à chaque semaine: le marché publicitaire ne pouvait soutenir une telle offre. Sans cette transaction, les journaux indépendants étaient appelés à disparaître».
Bémols
Par contre, certains membres d'Hebdos Québec émettent de sérieux bémols! Selon M. Yannick Patelli, directeur général de la coopérative de presse L'Oie blanche sur la Côte-du-Sud, il est plutôt rare qu'une association d'indépendants saute de joie à l'annonce d'une intégration verticale par un seul joueur: «Reste à voir la place laissée au journalisme régional dans cette nouvelle structure. Reste à voir également l'augmentation des coûts d'impression, de vente nationale et de distribution dans les prochaines années si la loi de la concurrence appuie cette transaction».
«La présence d'une seule multinationale n'est pas forcément une bonne nouvelle, ni pour les éditeurs ni pour les annonceurs. Une négociation sera nécessaire, région par région, entre le nouvel intégrateur et les indépendants» de renchérir M. Patelli.
Selon ce dernier, le cas des journaux coopératifs s'avère plus complexe, surtout si l'éditeur, pour sauver ses marges, ne peut que répercuter ses coûts sur ses clients, lesquels sont aussi les propriétaires du journal: «L'hebdomadaire, propriété des commerçants, ne souhaitera pas saigner ces derniers pour sauver sa publication. Juste un défi de plus!».
M. Charles Desmarteau, propriétaire du Journal La Relève à Boucherville, abonde dans le même sens que M. Patelli.
M. Gilles Bordonado, président de La Revue de Terrebonne, s'inquiète également: «Dans l'histoire des hebdomadaires au Québec, jamais il n'y aura eu une telle concentration de la presse entre les mains d'une seule entreprise. Je pense qu'en applaudissant aussi rapidement cette transaction, nous avons perdu de notre pouvoir de négociations avec TC Média qui doit absolument, à mon avis, offrir des garanties solides pour assurer la pérennité des journaux indépendants. Comme la très grande majorité des indépendants, je suis très heureux et très satisfait de mes ententes avec TC Média sur le plan de l'impression et de la distribution, mais on ne sait jamais ce que l'avenir nous réserve devant une entreprise en situation de quasi monopole. Qu'est-ce qui nous assure que TC Média ne se lancera pas dans une guerre de prix quand les choses ne tourneront pas à son avantage?».